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La meilleure attaque de panique que j’ai jamais eue

Il y a exactement un an, j’ai eu une crise de panique dans les toilettes de la Grande Bibliothèque à Montréal.

Tout a commencé par un backlog…

Permettez-moi de revenir un peu en arrière. J’étais en processus d’entrevue pour un poste de gestionnaire de produit au Service numérique canadien (SNC). J’avais déjà réussi les deux premières étapes, qui consistaient à présenter mon curriculum vitæ et à passer une entrevue téléphonique visant à évaluer certaines de mes qualifications et de mes expériences de travail. J’étais maintenant à la troisième étape : l’exercice technique.

Je devais établir l’ordre de priorité d’un backlog, qui est un outil que les équipes de produits utilisent comme source unique de vérité pour surveiller le travail en cours et déterminer sur quoi travailler ensuite. J’étais entièrement concentrée sur cet exercice. J’essayais de gérer un faux backlog pour un produit imaginaire qui avait été conçu pour l’entrevue.

Pourtant, malgré ma concentration, j’étais là, enfermée dans la salle de bain, en pleurs et incapable d’en venir à une solution.

Il était 17 h. J’avais jusqu’à 19 h pour envoyer mes réponses. Il me restait deux heures.

(Divulgâcheur : je suis maintenant gestionnaire de produit au SNC. Cette histoire a donc une fin heureuse.)

La crainte de l’échec

J’ai déjà travaillé avec des backlogs dans des emplois antérieurs, alors je savais que si je devenais gestionnaire de produit au SNC, ce serait un outil que j’utiliserais tous les jours. Je devais donc pouvoir faire cet exercice. Je devais réussir. Il fallait que je trouve la bonne solution.

Mais je n’avais pas de bonne solution. Tout ce que j’avais, c’était beaucoup de questions. Et c’était effrayant. J’avais peur d’échouer. Pour de nombreuses raisons personnelles et professionnelles, j’avais besoin de cet emploi. À ce moment-là, tout mon avenir semblait lié à ma capacité de trier ces cartes et ces colonnes dans Trello.

J’ai craqué sous la pression dans cette bibliothèque. J’ai pleinement accueilli mon échec imminent. Je ne craignais plus un mauvais résultat, je l’avais déjà accepté. La possibilité d’obtenir ce poste était désormais exclue pour moi, parce que je ne connaissais pas la réponse que l’on attendait de moi.

Le pouvoir de ne pas savoir

Ma peur était partie, et mon bien-être personnel n’était plus en jeu. Je pouvais alors très bien percevoir ma réponse : Je-ne-savais-pas.

J’ai donc écrit toutes mes questions : Quel était le produit? D’où venait le besoin? Quel était le contexte d’élaboration des premières fonctionnalités? De quoi l’équipe avait-elle besoin pour livrer la marchandise? Quel était l’héritage technique? Ce sont les éléments qui manquaient pour que je puisse prendre des décisions éclairées.

J’ai imaginé des façons de trouver des réponses à ces questions, et j’ai créé un plan pour aller de l’avant malgré les incertitudes, en accordant la priorité aux questions auxquelles il fallait répondre et aux variables inconnues avec lesquelles nous pouvions composer.

C’est ainsi qu’en une heure, tout en acceptant la possibilité d’un échec, tout en partageant ma réponse imparfaite, j’ai accompli le travail.

En me libérant des idées négatives que je me faisais, j’ai atteint un espace plus sûr pour réfléchir aux problèmes. Cela m’a permis de produire une réponse honnête, qui était : En fait, il n’y a pas de bonne réponse, seulement des moyens d’y parvenir.

Ce que j’ai appris dans cette bibliothèque

Je suis gestionnaire de produit au SNC depuis maintenant 11 mois. Je travaille avec les backlogs sur Trello tous les jours. Notre équipe s’en sert pour établir l’ordre de priorité des travaux visant à améliorer les services gouvernementaux offerts aux Canadiens.

J’ai beaucoup réfléchi à cette crise de panique ces derniers temps, et je me suis rendu compte que j’ai appris quelque chose de très précieux dans cette bibliothèque :

Admettre les limites de mes connaissances a été une première étape cruciale dans la découverte d’une solution au problème. Mais pour y arriver, je devais être à l’aise avec la possibilité d’un échec.

En nous concentrant sur les conséquences négatives, nous entravons notre capacité à prendre des décisions éclairées. Maintenant, je me donne comme priorité de toujours créer un espace sûr pour que mon équipe puisse exprimer les limites de ses connaissances, d’accueillir les zones inconnues dans les réunions, et de permettre aux gens d’échouer sans reproches. Je suis d’avis que c’est ainsi que nous progresserons et trouverons des solutions ensemble.

Aucune personne n’est responsable de trouver, seule, la bonne réponse. Nous sommes tous humains et limités, mais nous savons apprendre.

P.S. : Poser des questions, admettre que j’ignore quelque chose et permettre aux autres d’essayer, c’est en fait mon travail maintenant. Et j’adore ça.