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Comment nommer avec soin les services gouvernementaux

Les mots que nous utilisons en tant que fonctionnaires pour nommer les services et programmes gouvernementaux sont importants. Ils façonnent les attentes du public. Quand on y pense, ces mots, qui dans un monde idéal ont été soigneusement choisis, montrent aux gens que nous servons que nous pouvons leur offrir des solutions et ressources répondant à leurs besoins. Un nom mal choisi peut prêter à confusion et conduire à des malentendus.

Nous avons tiré des leçons de ce genre d’exercice et allons vous transmettre dans ce billet de blogue quelques astuces!

Que faire quand nom et attentes divergent…

La première équipe de produit que j’aie rejointe au SNC s’appelait l’équipe de prédécouverte. Les prédécouvertes étaient des analyses numériques de programmes gouvernementaux visant à aider les fonctionnaires à développer ou construire un service numérique au sein de leur propre équipe. Elles avaient d’abord été conçues comme une manière pour le SNC d’évaluer le potentiel d’un partenaire en vue d’une collaboration continue.

Mais plus nous travaillions à appuyer des équipes numériques au sein du gouvernement, plus nous nous heurtions au même problème : nos parties prenantes nous posaient des questions auxquelles nous ne pouvions répondre, comme « Quand passerons-nous de la prédécouverte à la découverte? » ou encore « Avons-nous réussi le test, allez-vous poursuivre votre partenariat avec nous? »

Bien qu’à l’époque le nom de « prédécouverte » s’inscrivait bien à la philosophie du SNC en matière de partenariats, le préfixe « pré- » invitait les gens à supposer qu’une autre étape suivrait, comme une découverte, un partenariat à plus long terme avec le SNC, ce qui n’était pas prévu. Après quelques prédécouvertes, il est devenu évident que le nom du service prêtait à confusion.

Le métier de concepteur·rice de contenu consiste en partie à venir à bout de la complexité et de l’ambiguïté. J’ai donc commencé à m’intéresser à l’histoire du service et je me suis rendu compte que la portée de ce dernier avait évolué depuis sa création. À l’origine, le service portait le nom d’« évaluation numérique » (mais nous n’auditions ni ne testions les programmes gouvernementaux; nous nous informions plutôt sur la prestation de leurs services numériques) avant d’être baptisé le service de « prédécouverte ». Un nom qui semblait plus neutre, mais qui n’avait pas beaucoup de sens pour notre clientèle.

En réalisant un certain nombre d’exercices en matière de conception de contenu et en testant nos idées auprès de notre clientèle, nous avons trouvé un nouveau nom pour notre service. Notre processus s’est composé de trois étapes.

1. Poser les bonnes questions

Poser les bonnes questions peut mener à un nom rempli de sens.

Pour trouver de nouveaux noms potentiels, parlez à des collègues qui travaillent sur le service, épluchez la recherche sur les utilisateur·rice·s et les artefacts et posez des questions axées sur les points suivants :

  • Que fait le service ou le produit pour les utilisateur·rice·s (de leur point de vue)?
  • Quel nom portent les services ou produits du même genre?
  • Quelle est la principale mission du nom : être mémorable, unique, décrire ce que fait le service? Ou être ludique? Doit-il être formel ou officiel?
  • À qui le service est-il destiné et quel type de langage ces personnes utilisent-elles ou à quel type de langage ces personnes pourraient-elles répondre? Quel est le nom que les utilisateur·rice·s donnent au service?
  • Quels sont les synonymes ou quasi-synonymes du nom recherché? Quels en sont les antonymes?
  • Quelles sont les autres manières de considérer le produit ou le service?

Une fois ces idées regroupées, analysez le sens de ces mots, leurs autres utilisations et ce que vous trouvez sur Google à propos d’éléments portant ce nom ou un nom similaire.

Puis allez un peu plus loin : Quelles sont les connotations associées à ces mots ou services? Correspondent-elles au sens que vous souhaitez communiquer? Sont-elles neutres ou sont-elles en conflit avec le sens du service?

2. S’essayer à la création d’un schéma de mots

Les schémas de mots consistent à réunir, de façon ludique et visuelle, un ensemble de mots que les personnes utilisent pour décrire un service (comme un champ sémantique), puis à les organiser en thèmes communs. J’aime attribuer à chaque mot une forme, comme une petite bulle.

Une fois que votre liste de mots est suffisamment importante pour paraître ingérable, commencez à regrouper les mots par catégorie ou par relation. Vous pouvez utiliser des flèches, des lignes, des couleurs, etc. pour souligner les thèmes communs et les relations. Sans aller aussi loin, vous pouvez également regrouper des idées communes et des sens connexes en rapprochant les termes les uns des autres.

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Titre : Schéma de mots sur l’exploration (de la prédécouverte à l’exploration)

L’aspect le plus utile de cette technique repose sur le fait qu’elle permet de connaître le contexte et l’utilité du service, ce qui est essentiel à la sélection d’un nom adapté.

Séparer les renseignements en catégories distinctes vous simplifiera la tâche et vous aidera à comprendre ce que certains mots ou segments de texte ont de commun ou de différent. Vous pourrez trouver dans ces mots le sens du service et ainsi définir un nom qui lui conviendrait. Ou, si vous avez de la chance, vous pourriez trouver le nom que vous cherchez directement au sein de ce schéma.

3. Testez vos idées auprès d’utilisateur·rice·s

Pour nommer un service, il est crucial de mener des entrevues et des ateliers auprès des utilisateur·rice·s. Les meilleures pratiques et les exercices de schéma de mots permettent de trouver de nouveaux noms potentiels, mais c’est en discutant avec une clientèle impartiale issue de contextes divers que l’on peut tester la viabilité de ces options.

Dans le cadre d’entrevues ou d’ateliers, vous pouvez interroger votre clientèle sur les différents noms envisagés, sur le sens que ces noms ont pour elle et sur la façon dont ces noms correspondent au service reçu ou s’en éloignent.

Ces entrevues peuvent être menées dans le cadre d’un effort de recherche plus important. Pour notre part, nous avons interrogé notre clientèle dans le cadre d’une entrevue de fin de mission et avons recueilli sa rétroaction sur le service dans son ensemble. Nous avons ainsi pu nous assurer que le nom potentiel communiquait le sens et la réponse voulus et aller de l’avant en toute confiance.

De la prédécouverte à l’exploration!

Lorsque j’ai commencé à créer le schéma de mots pour mieux qualifier nos services d’analyse numérique, le terme qui revenait le plus au sein de notre équipe était un mot tout simple : « exploration ». Nous explorions la prestation de services numériques au sein du gouvernement du Canada, en collaboration avec nos partenaires. De bien des façons, nous parcourions de nouveaux territoires, faisions de petites découvertes en chemin et guidions nos partenaires dans l’exploration de leurs propres services en posant sur ces derniers un regard nouveau.

À l’heure actuelle, nous nous adaptons au parcours numérique de nos nouveaux partenaires afin d’explorer les conditions de service numériques uniques qui leur sont propres. Les explorations ne mènent pas toujours à un autre partenariat, et il n’y a rien de mal à ça.

Pour résumer, si le nom d’un service n’est pas adapté et vous laisse perplexe, n’essayez pas de vous y faire : changez-le! Si vous ne discernez pas clairement le but d’un service d’après son nom, il y a de bonnes chances que votre public cible soit dans la même situation que vous, et ce, qu’il s’agisse de membres du public accédant aux services gouvernementaux ou de fonctionnaires cherchant de l’aide pour opérer des changements numériques!


Souhaitez-vous en apprendre davantage sur les techniques de conception de contenu? Ça tombe bien, nous avons quelques suggestions pour vous :

  • Le livre Everyday Information Architecture (« Architecture de l’information quotidienne »), par Lisa Maria Martin, est un excellent premier ouvrage pour vous lancer dans l’analyse de contenu ainsi que dans la catégorisation et l’organisation de l’information. Il vous permettra également d’en apprendre davantage sur la façon dont les gens comprennent les mots et les renseignements.

  • Si vous souhaitez en apprendre davantage sur la création de sens dans un contexte complexe, le livre d’Abby Covert How to Make Sense of Any Mess (« Trouver du sens à n’importe quel désordre ») est un excellent point de départ.

  • Dans son livre, Good Services: How to design services that work (« De bons services : comment concevoir des services fonctionnels », une œuvre incontournable pour les concepteur·rice·s de services publics), Lou Downe recommande d’utiliser un verbe comme nom de service. Cela permet d’indiquer ce que le service fait du point de vue de la personne qui en bénéficie. (Dans notre contexte bilingue, il était plus adapté d’employer un nom comportant le suffixe « -ation », lequel indique un processus. Parfois, cela présente en plus l’avantage d’être le même mot en français.